Sciences humaines et sociales > Accueil > Technologie et innovation > Numéro
Cet article est l’introduction du dossier « Innovateurs et innovations, quelles trajectoires ? » qui compose ce numéro de Technologie et Innovation. Il rappelle ses enjeux puis il présente de façon synthétique ses principaux apports autour de quelques idées transversales. Les articles du dossier qui se concentrent sur les XIXe et XXe siècles sont remis en perspective historique puis chacun d’eux est brièvement introduit. Un second volume à paraitre dans un prochain numéro de Technologie et Innovation complétera le dossier.
Cet article a pour objet principal l’analyse de la trajectoire originale d’un marchand de bestiaux bordelais, François Guénon (1796-1855), concepteur d’un système innovant destiné à améliorer la sélection des meilleures vaches laitières, à la fin des années 1830 (décrit dans son Traité des vaches laitières, publié pour la première fois à Bordeaux en 1838). Son système empirique de sélection des « bonnes » laitières rencontre un réel succès auprès des éleveurs ainsi que des vétérinaires ou de certains agronomes. Cependant, ce succès initial est discuté par la suite, notamment à partir les années 1860, par certains agronomes, comme Eugène Tisserant (1818-1888), alors professeur d’hygiène à l’école vétérinaire de Lyon, qui ne le considèrent pas comme sûr et le jugent insuffisamment fondé scientifiquement. Or, ces remarques critiques n’entament en rien le recours au système Guénon par de nombreux éleveurs et n’empêche pas non plus son enseignement au sein de certains établissements techniques agricoles au début du XXe siècle.
A l’instar des autres charbonnages, les mines de Montrambert sont confrontées à une crise industrielle à la fin du XIXe siècle les mettant en difficulté sur certains marchés. Pour répondre à cela, la houillère souhaite mettre en valeur l’ensemble de ses houilles et notamment les déchets de celles-ci. Elle confie cette mission à Francis Blache : un ingénieur qui prend la tête des usines d’essai édifiées pour l’occasion. Pour satisfaire les exigences de la compagnie, il fait le choix de l’alliance entre la science et l’industrie et ouvre au charbonnage de nouveaux marchés notamment celui du gaz.
Cet article démontre que la gestion de l’innovation chez Eastman Kodak fut profondément modifiée entre 1880 et 1912. Son fondateur George Eastman évolua du statut d’entrepreneur inventeur contribuant directement à l’innovation de la firme à celui de coordinateur d’une nouvelle structure à partir de 1912. L’article souligne tout d’abord le risque endossé par Eastman à la fin des années 1880, ne pouvant compter que sur son photochimiste pour mettre au point en 1890 une nouvelle pellicule souple photosensible. L’article note ensuite la prise de conscience d’Eastman pour modifier en profondeur le modèle d’innovation chez Kodak, en créant en 1912 une nouvelle structure du savoir technique et scientifique, le laboratoire de recherche. Kenneth Mees, un scientifique britannique avec une expérience du marché photographique, prit la tête du laboratoire et mit en pratique ses théories sur l’organisation de la recherche. L’article conclut sur les bénéfices engendrés par le nouveau modèle d’innovation pour Kodak dans la recherche des procédés couleur, notant son évolution vers le concept récent d’innovation ouverte.
Dans la première moitié du XXe siècle l’industrie italienne se renforce et assume les caractéristiques de la grande entreprise. Parmi les protagonistes de cette période le rôle de l’ingénieur Leopoldo Parodi Delfino se révèle, une figure éclectique qui commence son activité dans le secteur des liqueurs et du vin, constituant en 1902 la « Società Fabbrica Nazionale Alcool Leopoldo Parodi Delfino » ; quelques années plus tard il créa la « Distilleria Nazionale » par laquelle il réussit à acquérir les sociétés « Distillerie Italiane » et les « Stabilimenti Vinicoli Florio ». En 1912 il passa à la production des explosifs, créant avec l’entrepreneur Giovanni Bombrini la « Società in nome collettivo Bombrini Parodi Delfino ». En 1918 il participa à la constitution de la « Società Mediterranea di Elettricità ». Ses capacités de gestion et sa position financière lui ont même permis d’entreprendre d’importants investissements à l’étranger. En 1918, il reprend la « Société des Mines de Selenitza » en Albanie et en 1921 il constitue en Equateur la « Compagnia italiana dell’Equatore ». En 1939 il est nommé Sénateur du Royaume d’Italie.
Samuel Colt est un personnage hors normes. Aventurier, passionné de mécanique et de chimie, il va se révéler comme un véritable entrepreneur d’industrie. A la fois bonimenteur et séducteur, tout au long de sa vie, il va développer son invention : le revolver et pour cela devenir un véritable homme d’affaires. Il s’assure des protections juridiques pour ses brevets, profite du contexte historique (conquête de l’Ouest, guerre avec le Mexique puis guerre de Sécession), augmente la productivité de sa fabrique et fait preuve de clairvoyance en matière de publicité et de marketing promotionnel. Samuel Colt sait se servir de son entregent pour offrir des armes de luxe aux hommes clef de différents états. Il sait rationaliser son usine, conçue selon ses plans, appliquant une sorte de segmentation du travail avant la lettre et appliquer un paternalisme social pour se fidéliser ses ouvriers.
Coiffeurs passionnés, fondateurs d’une académie et d’un journal, inventeurs brevetés, les hommes et les femmes de la famille Croisat innovent par bien des aspects et marquent le monde de la coiffure parisienne des années 1820 aux années 1860. L’objet de cet article est de mieux comprendre, à travers l’étude de la trajectoire de cette micro-dynastie, les éléments qui structurent le marché de la haute coiffure parisienne du milieu du XIXe siècle. Systèmes d’implantation de cheveux ou brosses à teindre, les produits brevetés par les Croisat sont intimement intégrés au processus de création des coiffures d’une part et à leur stratégie commerciale d’autre part. Leur intense activité pédagogique, tant dans les journaux que dans leur académie, répond de façon originale aux contradictions entre les besoins de visibilité de l’artiste et la défense du secret des procédés de l’artisan. Par la diffusion de modèles et de savoir-faire, l’entrepreneur-innovateur participe ainsi à la construction d’un marché pour les produits qu’il imagine.
2024
Volume 24- 9
Les filières de production dans la bioéconomie2023
Volume 23- 8
Intelligence artificielle et Cybersécurité2022
Volume 22- 7
Trajectoires d’innovations et d’innovateurs2021
Volume 21- 6
L’innovation collaborative2020
Volume 20- 5
Les systèmes produit-service2019
Volume 19- 4
L’innovation agile2018
Volume 18- 3
Innovations citoyennes2017
Volume 17- 2
Innovations de mobilité. Transports, gestion des flux et territoires2016
Volume 16- 1
Stimulateurs de l’entrepreneuriat innovant