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Vol 8 - Numéro 1

Ingénierie cognitique


Liste des articles

Fondements et impacts cognitifs du Nation branding
Karim Keita

Le Nation branding, que l’on peut définir comme étant l’application de principes de stratégie de marque à un Etat, est encore perçu comme une approche marketing destinée à valoriser l’image d’un pays. C’est sans doute cette perception réductrice qui a tenu à distance les chercheurs en sciences cognitives de ce concept complexe et polysémique. Pourtant, à l’analyse, il ressort que le Nation branding est en relation étroite avec ces sciences, que ce soit au niveau des processus de construction de marque nationale que de ses impacts sur les perceptions et comportements des publics-cibles (résidents, touristes, investisseurs, diasporas…). Dans un contexte généralisé de guerre cognitive multipolaire, le Nation branding, ainsi que son « bras armé », la Diplomatie publique, pourraient bien s’affirmer comme étant des atouts décisifs, tant au niveau de l’impact géo-politique qu’ils peuvent générer dans l’arène internationale, que de la résilience cognitive auxquels ils contribuent en fédérant des populations autour de narratifs identitaires cohérents. Il sera enfin inté-ressant d’aborder la thématique de la durabilité, que le Nation branding doit pouvoir intégrer à haut niveau pour qu’elle parvienne à structurer le développement économique des Etats, au Nord comme au Sud.


Perception de la temporalité en chirurgie : comment harmoniser le temps biologique nécessaire avec l’immédiateté de la culture numérique ?
Patrick Houvet

Le texte montre le décalage entre le temps numérique, instantané (IA, recherches en ligne), et le temps biologique, lent et incompressible, de la chirurgie (cicatrisation, consolidation, rééducation). Cette discordance crée des attentes irréalistes chez les patients. En s’appuyant sur René Leriche et les humanités médicales (Cerceo, Charon, Kleinman), l’auteur rappelle que la chirurgie est d’abord une relation humaine, faite d’écoute et de discernement du “bon moment”. L’IA améliore les étapes rapides (diagnostic, planification), mais ne peut pas accélérer la guérison : elle doit servir à expliquer, pas à promettre l’impossible.


Les dupes de parfums : guerre commerciale ou guerre cognitive ?
Karim Keita

Les dupes, versions accessibles des parfums de grandes marques, connaissent un succès commercial fulgu-rant depuis la pandémie de covid-19. Les réseaux sociaux ont contribué à ce succès, faisant des dupes un objet de viralité. Les consommateurs, notamment les plus jeunes, semblent adhérer très facilement à ce style de consommation alternative, mais légale, qui déconstruit des décennies de marketing sophistiqué et de branding élitiste. Opérant comme des mémes tangibles, ils séduisent et convertissent des consommateurs en quête de pouvoir d’achat, mais également de revendica-tions sociétales progressistes (inclusion, accessibilité, égalitarisme…). Au point d’avoir un effet sur les représentations culturelles associées au luxe, voire, sur les processus de cognition humaine. Ce ne serait alors pas d’une guerre commer-ciale entre Sud global (une majorité des dupes sont fabriqués en Chine) et pays du Nord dont il faudrait se garder, mais d’une guerre cognitive qui pourrait bien affaiblir durablement le système de domination culturelle mis en place par l’Occident à travers l’iconicité lentement et savamment construite de ses grandes marques de luxe.


Erreur, biais cognitifs, effet tunnel et travail d’équipe en chirurgie : leçons de l’aéronautique pour la sécurité des soins peri-opératoires
Patrick Houvet

Cet article entend articuler l’épidémiologie des EIAS / EIGS et les modèles systémiques (Reason, Vincent) pour orienter la prévention, la récupération et l’apprentissage organisationnel en santé notamment peri-opératoire. Il décrit le continuum erreur→incident→accident, où les limites cognitives (mémoire de travail, fatigue, stress et défauts de communication) jouent un rôle central. Les biais (ancrage, confirmation) et l’effet tunnel sont ciblés par des techniques de “debiasing”. Le CRM/TEM structure le travail d’équipe : briefings, leadership adaptatif, communication fermée, cockpit stérile. Les check-lists (OMS, SURPASS) et transmissions (I-PASS/SBAR) réduisent la mortalité et les complications de manière documentée. Le Protocole de Londres 2024 (LP24) actualise l’ACR/ALARM et ancre le REX dans une logique non culpabilisante. La perspective Safety-II/HRO promeut des organisations “safe-to-fail”, sensibles aux opérations et déférentes à l’expertise. Le numérique (CPOE/CDS, BCMA, Emergency Manuals, OR Black Box, scores précoces/IA) accélère la détection, la traçabilité et l’apprentissage.


Optimisation cognitive de la prise de décision dans les systèmes fortement automatisés : tirer ou ne pas tirer lors d’un engagement aérien (simulation)
Jean-Christophe Hurault, Grégory Froger, Marianne Jarry, Anne-Lise Marchand, Colin Blättler

La montée en puissance de l’intelligence artificielle dans les systèmes de combat aérien accélère la collecte et l’agrégation d’informations, mais laisse à l’humain la responsabilité finale des décisions critiques, purement cognitives, telle que la décision de « tirer / ne pas tirer ». Ce type de décision engendre une charge cognitive élevée, car l’opérateur doit intégrer, en un temps très court, des informations hétérogènes. L’objectif de cette étude est d’optimiser les performances à cette prise de décision par un entraînement reposant sur des scénarios issus de retours d’expérience, mis en oeuvre dans un dispositif agile et facilement déployable. Soixante-dix membres d’équipage, affectés en escadron de chasse et issus de l’Armée de l’Air et de l’Espace française, ont participé : un groupe expert (N = 39) et un groupe intermédiaire (N = 31). Le protocole expérimental comprend, pour les intermédiaires, un pré-test, un entraînement de quarante-cinq minutes et un post-test, tandis que pour les experts, le protocole se limite à un pré-test. Les résultats sur les performances (taux d’exactitude et temps de réponse) des experts, comparés à celles des intermédiaires, indiquent que le dispositif d’entraînement mobilise effectivement des connaissances expertes dans ce type de prise de décision. Après l’entraînement, les intermédiaires améliorent significativement leurs performances. Le transfert de cette amélioration en milieu opérationnel devra être confirmé par de futures recherches. Néanmoins, ces résultats soutiennent le développement d’entraînements aisément déployables en escadron et pouvant s’intégrer de façon complémentaire aux dispositifs de formation existants. Malgré l’intensification de l’usage des systèmes basés sur l’IA, l’humain restera dans la boucle décisionnelle. Il convient donc de continuer les efforts de formation et d’entraînement pour maintenir l’efficacité des humains « aux commandes » et comprendre comment utiliser l’IA de manière adaptée pour accompagner les décisions humaines. C’est dans cette perspective que s’inscrit la présente étude afin que les développements technologiques ne laissent pas l’humain « derrière l’avion ».


Classification automatique des émotions par exploitation du capteur de mouvement et de la dynamique de frappe sur smartphone
Nicolas Simonazzi, Jean-Marc Salotti, Caroline Dubois, Philippe Le Goff

Nous présentons les résultats d’une étude sur une classification binaire des émotions, à partir de données recueillies grâce aux capteurs de mouvement et aux frappes clavier d’un smartphone et d’un bracelet connecté. À cette fin, nous avons développé une application mobile permettant d’induire des émotions par le biais de vidéos et d’enregistrer les interactions des utilisateurs. Un système d’auto-évaluation numérique spécifique a été développé à partir de la Geneva Emotion Wheel pour aider les participants à exprimer leurs émotions. Les enregistrements des capteurs ont été étiquetés en fonction des déclarations des participants et des conditions vidéo. Une méthode est ainsi proposée pour traiter les données temporelles collectées et classer automatiquement la valence des émotions déclarées grâce à des techniques d’apprentissage automatique. Nous avons testé une classification générale de la valence utilisant toutes les émotions de tous les individus et une classification personnalisée utilisant un sous-ensemble d’émotions d’un seul individu. Le résultat le plus prometteur a été obtenu avec un modèle personnalisé, pour lequel nous avons pu obtenir, en moyenne pour tous les participants, deux tiers de classification correcte de la valence, en utilisant des données fusionnées de différentes modalités.

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