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Innovations et innovateurs, quelles trajectoires ?
Sophie Boutillier, Université du Littoral-Côte d’Opale
Cédric Perrin, Université Evry Val d’Essonne
Nos vies quotidiennes sont peuplées d’une multitude d’objets industriels (télévision, radio, téléphone, ordinateur, pâte à tartiner, boisson pétillante, conserves et surgelés, appareils électroménagers, parfum et produits de maquillage, jeans…) ainsi que d’une grande variété de services (banques, commerces divers - y compris électroniques -, assurances, loisirs, tourisme…) qui façonnent nos sociétés de consommation. Ces produits peuvent sembler éternels aux consommateurs, qui ne les questionnent pas à chaque fois qu’ils s’en servent. Pourtant, ils ont d’abord été des innovations derrière lesquelles se trouvent des inventeurs, des scientifiques et des entrepreneurs, plus largement des innovateurs. Certains n’ont que partiellement participé à leur conception, alors que d’autres ont donné le coup de pouce décisif pour transformer une invention en innovation puis en bien de consommation, habillé avec un message publicitaire adéquat. Par son activité, ils contribuent tous à transformer leur environnement et la société, les modes de travail et de consommation. Des historiens de l’économie ont proposé d’explorer sur le temps long de l’histoire la façon dont les entrepreneurs ont fondamentalement participé à ces évolutions (Landes et al., 2010). Les entrepreneurs sont longtemps restés les grands oubliés de l’histoire économique. A titre d’exemple, le sommaire de l’Histoire économique et sociale de la France (Braudel, Labrousse, 1979) propose des chapitres sur les entreprises, mais pas sur les entrepreneurs, ni sur les innovateurs. Ces derniers ont ensuite été appréhendés par les historiens à partir de la grille d’analyse schumpetérienne (Aldrich, 2011 ; Boutillier, Uzunidis, 2017 ; Casson, 2013 ; Chadeau, 1982). Schumpeter (1911, 1942) avait bien salué en son temps, l’entrepreneur comme le révolutionnaire de l’économie. L’entrepreneur n’est pas forcément un inventeur, mais il est un innovateur, en réalisant généralement la mise sur le marché du nouveau produit ou service. Par ailleurs, depuis la théorie de Galbraith (1968), de la filière inversée, il est acquis que l’offre crée la demande et que les entrepreneurs offrent sur le marché les produits que les consommateurs … attendent. Depuis les années 1980, l’histoire des entreprises a enrichi et diversifié ses approches de l’entrepreneur et de l’innovateur en s’interrogeant sur leurs environnements socio-culturels (système de valeurs, réseaux, diaspora…) ou encore politiques en intégrant l’économie des institutions (cadre juridique, politiques de l’innovation, investissements et équipements publics…) (Jones, Zeitlin, 2007). Ainsi, si les entrepreneurs-innovateurs transforment leur société, leur réussite dépend aussi des conditions et des ressources qu’ils trouvent en elle, des contextes socio-historiques.
L’objectif de ce numéro de Technologie et Innovation est de réunir les contributions de chercheurs, historiens, économistes ou sociologues, spécialistes de ces sujets. Les propositions d’articles partiront de cas précis d’un produit, d’un service ou d’un entrepreneur-innovateur bien identifiés. Elles pourront retracer la trajectoire de l’idée au bien de consommation, en d’autres termes la création d’un marché, interroger le(s) rôle(s) des entrepreneurs-innovateurs dans ce processus, mettre en évidence les circonstances, les contextes et les ressources dont ceux-ci ont bénéficié. Le choix des périodes historiques et des aires géographiques est totalement ouvert ; le chercheur pourra se concentrer sur une période très ancienne ou au contraire relative à l’époque contemporaine.
Références
Aldrich H. E., 2011, An Evolutionary Approach to Entrepreneurship, Edward Elgar.
Boutillier S., Uzunidis D., 2017, The entrepreneur, ISTE Editions.
Braudel F., Labrousse E., 1979, Histoire économique et sociale de la France, Presses universitaires de France.
Casson M, Casson C., 2013, The entrepreneur in History, Palgrave macmillan.
Chadeau E., 1982, L’économie du risque : les entrepreneurs de 1850 à 1980, Olivier Orban.
Jones G., Zeilin J., 2007, The Oxford Handbook of Business History, Oxford.
Galbraith J. K., 1968, Le nouvel état industriel, Gallimard.
Landes D. S., Mokyr J., Baumol W.J., 2010, The invention of enterprise. Entrepreneurship from Ancient Mesopotamia to Modern times, Princeton University Press.
Schumpeter J. A., 1911, Théorie de l’évolution économique, Dalloz (édition 1935).
Schumpeter J. A., 1942, Capitalisme, socialisme et démocratie, Payot (édition 1979).
Calendrier :
15 décembre 2019 : Envoi du résumé : 300 mots et références bibliographiques.
31 janvier 2020 : réponse du comité scientifique
30 juin 2020 : envoi des textes
30 septembre 2020 : retour des évaluateurs
30 novembre 2020 : envoi du texte final
Premier semestre 2021 : publication du numéro de Technologie et Innovation
Les résumés et les textes sont à envoyer à :
- Sophie.boutillier@univ-littoral.fr
- Cédric Perrin : cp2002@orange.fr