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Appel à articles : Economie circulaire


APPEL A COMMUNICATIONS
Revue Technologie et Innovation


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Titre envisagé : Conduire la transition vers l’économie circulaire

Editeurs invités : Jean-Claude Boldrini et Nicolas Antheaume (IAE Nantes Economie & Management)

Réception des propositions et articles à l’adresse suivante : jean-claude.boldrini@univ-nantes.fr
 

Délais :
Réception des propositions d’articles (2 pages maximum) : 31 janvier
- Avis d’acceptation ou de refus des propositions : 15 février
- Réception des articles (6000 à 8000 mots), dernier délai : 31 mars
- Retour des évaluations : 30 avril
- Réception des articles révisés : 1ier juin
- Avis d’acceptation définitive par les évaluateurs : 15 juin
- Publication : septembre 2018
 

Appel à communication
Des initiatives de reconfiguration des filières, dans une perspective d’économie circulaire, devraient se multiplier à l’avenir sous l’impulsion de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (loi n° 2015-992 du 17/08/2015). L’article L. 110-1-1 de cette loi précise que « la transition vers une économie circulaire vise à dépasser le modèle économique linéaire consistant à extraire, fabriquer, consommer et jeter en appelant à une consommation sobre et responsable des ressources naturelles et des matières premières primaires. » Dans l’idéal l’économie circulaire vise à découpler la croissance économique de la consommation de ressources, particulièrement celles qui sont non-renouvelables (EFM, 2015). Elle est ainsi vue comme un nouveau modèle d’affaires conduisant à un développement plus soutenable (Ghisellini et al., 2016).

 

Aujourd’hui, dans une acception courante, l’économie circulaire est souvent assimilée et réduite au recyclage des déchets ou des sortants d’une filière pour les réintroduire en amont de celle-ci. Le recyclage n’est pourtant que l’un de sept piliers de l’économie circulaire identifiés par l’ADEME, les six autres étant l’approvisionnement durable, l’écoconception, l’écologie industrielle et territoriale, l’économie de la fonctionnalité, la consommation responsable et l’allongement de la durée d’usage (ADEME, 2014). Ces piliers peuvent conduire à des stratégies, outre le recyclage, telles que la réduction (de la consommation de matières premières et d’énergie ainsi que des déchets), le réemploi, la réparation, la remise à neuf (Ghisellini et al., 2016).

 

Les répercussions d’une transition vers l’économie circulaire peuvent être potentiellement considérables dans la mesure où elles impliquent des transformations simultanément aux niveaux micro (produits, processus de l’entreprise…), méso (organisation de la filière, création et partage de la valeur) et macro (enjeux globaux).

 

Un produit conçu pour l’économie circulaire est différent de celui développé en économie linéaire. Grâce à des démarches d’écoconception (Schiesser, 2011), le produit est, par exemple, plus facile à démonter et à réparer, les matériaux utilisés seront peu impactants. En fin de vie la séparation des différentes matières est facilitée. Cela évite que les produits usagés deviennent des déchets. Au contraire ils deviennent des ressources réintroduites en amont de la filière de production ce qui permet de réattribuer de la valeur (Sempels et Hoffmann, 2013 ; Le Moigne, 2014). Dans la mesure où l’économie circulaire vise à conjuguer performances économiques, environnementales et sociales, l’ensemble des critères de valeur des produits sont révisés. Pour augmenter la valeur des produits et la satisfaction des clients, des services (maintenance, reprise…) leur sont adjoints formant ainsi des systèmes produit – service (Tukker, 2004) et notamment des systèmes produit-service soutenables (Manzini et Vezzoli, 2003 ; Chou et al., 2015). Ces évolutions complexifient la tâche des concepteurs et accroissent leurs rôles et leurs responsabilités (Joore et Brezet, 2015) ce qui pose la question des méthodologies de conception susceptibles de répondre à ces défis (Maxwell et al., 2006 ; Vasantha et al., 2012 ; Vezzoli et al., 2015).

 

Les systèmes produit – service sont fréquemment associés à des modèles d’affaires (Barquet et al., 2013). En économie circulaire, la facturation de l’usage d’un bien ou de l’atteinte d’un résultat est souvent préférée à la vente de produits pour utiliser les ressources de manière plus efficiente (Tukker, 2015 ; Reim et al., 2015) et tendre vers une économie de la fonctionnalité (Bourg et Buclet, 2005). Des modèles d’affaires « soutenables » (Boons et Lüdeke-Freund, 2013 ; Bocken et al., 2016), « verts » (Roos, 2014) ou « circulaires » (Antikainen et Valkokari, 2016 ; Lewandowski, 2016) se développent bien qu’il puisse aussi y avoir des freins à leur adoption (Planing, 2015). En effet, le fournisseur qui reste propriétaire du produit voit sa responsabilité étendue sur tout le cycle de vie du produit. Le client, de son côté, peut être privé d’une partie de son autonomie et de sa liberté de choix dans l’acte de consommation (Ceschin, 2013 ; Tukker, 2015).

 

Dans les systèmes bouclés, des acteurs peuvent devenir simultanément client et fournisseur l’un de l’autre (Gelbmann et Hammerl, 2015). Cela affecte non seulement les régimes de propriété du produit mais également les mécanismes de création et de partage de la valeur (Roos et al., 2014 ; Bolton et Hannon, 2016) et l’organisation des chaînes de valeur. Si les filières linéaires ont été optimisées et sont désormais souvent très efficientes, il n’en est pas encore de même des chaînes logistiques inverses destinées à collecter les produits usagés pour les réintroduire dans le cycle de production, de distribution ou d’utilisation (Le Moigne, 2014). Pour les développer les entreprises doivent acquérir de nouvelles compétences (écoconception…) et les filières doivent intégrer de nouveaux métiers (valoristes…). Cela entraîne de nouvelles relations entre les acteurs davantage fondées sur des stratégies collectives (Astley et Fombrun, 1983) que sur la concurrence. Des acteurs hors marché (pouvoirs publics, collectivités territoriales, syndicats professionnels…) peuvent faciliter ou entraver des initiatives de transition vers l’économie circulaire et influer ainsi sur la (re)configuration de la valeur (Lecocq et Yami, 2004).

 

Afin que les chaînes logistiques de l’économie circulaire, avec leurs multiples boucles de retour possibles (réparation, réutilisation, rénovation, recyclage…) soient soutenables, les modes de gouvernance institués par leurs acteurs sont fondés sur une coopération renforcée et des prises de décisions conjointes (Vurro et al., 2010) afin que la stratégie des entreprises soit compatible avec la soutenabilité écologique des écosystèmes globaux (Borland et al., 2016).

 

Les initiatives de transition vers l’économie circulaire sont initiées par des entrepreneurs ou des intrapreneurs souvent isolés au départ. Progressivement, au fil des expérimentations, des projets pilotes, des alliances avec d’autres, et de la diffusion des premières innovations (Huguenin et Jeannerat, 2017), le travail institutionnel de ces acteurs fait évoluer les systèmes technologiques, politiques, culturels ou institutionnels (Lawrence et Suddaby, 2006). En cas de réussite des phases de décollage et de percée de ces initiatives, les transitions en cours peuvent conduire à des processus de profonde transformation d’une société qui s’étendent sur une génération ou plus (Rotmans et al., 2001) voire mener à des changements de structure de la société sur une durée longue (Geels, 2005). Une mesure des avancées de la circularité à partir d’indicateurs de niveau uniquement micro (les entreprises) ou méso (les secteurs) peut toutefois engendrer des effets rebond et masquer des dégradations en termes de consommation accrue de ressources à l’échelle macro (la planète Terre) (Arnsperger et Bourg, 2016).

 

Les contributions attendues visent à apporter des réponses théoriques, méthodologiques ou empiriques à des questions, sans qu’elles soient exhaustives, telles que :

- Comment concevoir les systèmes produit-service de l’économie circulaire ?
- Comment la valeur du produit est-elle reconfigurée ? Quels attributs de valeur sont-ils transformés, ajoutés ? Quels sont les services additionnels proposés ?
- Quelles sont les méthodologies de conception utilisées ?
- Comment les concepteurs conjuguent-ils objectifs économiques, environnementaux et sociaux ou à quels arbitrages doivent-ils procéder ?
- Pour quels types de boucles fermées (réduction, réemploi, réparation, recyclage…) les stratégies de conception sont-elles mises en œuvre ? Quels sont les critères de décision ?
- Quels sont les modèles d’affaires déployés ? Quels sont leurs avantages et limites ?
- Quels sont les mécanismes de (co-)création et de partage de la valeur dans l’entrelacs des organisations impliquées dans une initiative de transition vers l’économie circulaire ?
- Comment organiser les chaînes logistiques inverses ?
- Quelles sont les compétences nouvelles à acquérir pour initier une transition vers l’économie circulaire ?
- Quels sont les outils de gestion et d’aide à la décision mobilisés, ou créés, au moment de la conception, du développement et du pilotage d’initiatives de transition vers l’économie circulaire ?
- Quels sont déterminants globaux (réglementations, cours mondiaux des matières premières…) et les acteurs susceptibles de faciliter ou d’inhiber le fonctionnement de boucles locales fermées ?
- Quels sont les acteurs qui initient les démarches de transitions vers l’économie circulaire ? Quelles sont leurs stratégies ? Quels alliés et porte-parole mobilisent-ils ?

- Comment relier les questions de conception des systèmes produit – service à celles de la gouvernance d’une chaîne de valeur globale ? Comment articuler les dimensions locales et globales de l’économie circulaire ?

 

Références

A. D. E. M. E. (2014), Guide méthodologique du développement des stratégies régionales d’économie circulaire en France, Paris-Angers, A. D. E. M. E.
Antikainen, M. , Valkokari, K. (2016), A Framework for Sustainable Circular Business Model Innovation, Technology Innovation Management Review, 6( 7), 5-12.
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